Demandez à l’expert : Melissa Jacobs, First Capital REIT
Personnel du CBDCa on mai 25, 2023
Arrivée à First Capital REIT en 2017, Melissa Jacobs est aujourd’hui vice-présidente, ESG. Experte en la matière pour les parties prenantes internes, elle coordonne la stratégie de durabilité de l’entreprise, notamment l’élaboration et la mise en œuvre du programme, l’évaluation des progrès et les rapports ESG. Active au sein de plusieurs organisations de l’industrie, y compris le CBDCA, Melissa a reçu diverses distinctions, dont le Prix Clean 50 et le Prix de reconnaissance Partenariat progressiste. Elle a été nommée parmi les 100 femmes d’élite de l’immobilier. Nous l’avons interviewée récemment pour discuter de l’importance de mobiliser tous les intervenants du secteur du bâtiment dans la transition des grands portefeuilles immobiliers vers le carbone zéro.
Parlez-nous un peu du poste que vous occupez et du parcours qui vous y a menée.
First Capital est depuis longtemps un chef de file de la durabilité, ayant créé son programme en 2010. J’y suis entrée en octobre 2017, en tant que directrice de la durabilité, mais le poste existait déjà depuis plusieurs années (depuis 2010, en fait). À l’époque, j’étais la seule membre de cette direction et mes principales responsabilités étaient d’améliorer l’efficacité énergétique de nos propriétés existantes et de préparer les rapports de durabilité de l’entreprise.
Aujourd’hui, l’ESG est une priorité de plus en plus stratégique dans l’entreprise et elle est intégrée dans tous ses domaines d’activité. En tant que vice-présidente, ESG, je suis responsable d’orienter et de favoriser l’engagement et l’amélioration continue de l’ESG dans tous nos domaines d’activité, y compris le développement durable, la décarbonation de notre portefeuille, la résilience climatique et les initiatives de déclaration de la durabilité. Au cours des deux dernières années, l’équipe s’est agrandie et j’ai maintenant le soutien d’un gestionnaire de l’énergie et de la durabilité et d’un coordonnateur des programmes ESG.
En ce qui concerne mon parcours, j’ai obtenu avec distinction un baccalauréat en études environnementales de l’Université York en 2007 et j’ai eu la chance d’être embauchée à temps plein par l’Autorité de conservation de la région de Toronto. Mon employeur m’a détachée auprès du World Green Building Council où j’ai fait partie d’une petite équipe chargée d’établir le premier secrétariat de l’organisme. Je me suis orientée ensuite vers la durabilité d’entreprise et l’immobilier commercial et j’ai travaillé chez Bentall GreenOak (Bentall Kennedy, à l’époque) avant de me joindre à First Capital.
Vous avez élaboré la stratégie de First Capital REIT pour décarboner le portefeuille de l’entreprise. Quelles sont les principales leçons que vous en avez tirées
Je dirais que nous en sommes encore au stade de l’élaboration de notre stratégie de décarbonation, mais nous avons réalisé certains progrès importants dans la dernière année.
L’une des principales leçons que j’en ai tirées, c’est qu’il ne faut pas attendre d’avoir tout déterminé pour établir des cibles et commencer à agir. On a parfois tendance à croire que les données doivent être parfaites et que le parcours vers la décarbonation doit être bien défini et détaillé avant de s’y engager. Mais en réalité, les données seront toujours en évolution et les voies vers la décarbonation changeront au fil des ans et des percées technologiques. Nous sommes tous dans le même bateau, personne n’a vraiment tout compris et tout déterminé.
Notre approche à la planification de la décarbonation a été d’établir une cible provisoire ambitieuse et crédible par le biais d’une initiative fondée sur la science – en veillant à ce que cette cible concorde avec l’objectif principal de l’Accord de Paris – pour limiter l’augmentation de la température mondiale à 1,5 ° Celsius au cours du présent siècle.
Notre objectif provisoire est de réduire les émissions de GES de 46 pour cent d’ici 2030, en utilisant l’année 2019 comme année de référence, et notre objectif à long terme est d’atteindre la carboneutralité. Dans le cadre du processus d’établissement des objectifs, nous avons réalisé quelques modélisations de haut niveau pour comprendre de manière générale comment nous pourrions les atteindre. Comme ces objectifs sont ambitieux, nous nous affairons actuellement à élaborer des plans d’action de réduction des GES qui portent notamment sur l’efficacité opérationnelle, les initiatives de rénovation, la participation des locataires, l’amélioration des normes de construction, les dépenses en immobilisations et la production d’énergie renouvelable. Nous visons l’achèvement des plans de réduction des GES d’au moins 80 pour cent de nos immeubles en 2023.
Dans quelle mesure est-il essentiel d’engager les locataires dans vos projets de rénovation?
Pour First Capital, l’engagement des locataires dans les projets de rénovation sera essentiel pour l’atteinte de nos objectifs de décarbonation. Notre portefeuille est principalement constitué de centres commerciaux à ciel ouvert qui comprennent des épiceries et par conséquent, une grande partie de la consommation d’énergie sous notre contrôle est attribuée à l’éclairage extérieur des aires communes et des stationnements. Notre empreinte des champs d’application 1 et 2 est une petite fraction de notre empreinte carbone globale. Nous avons estimé que nos émissions du champ d’application 3 représentent jusqu’à 90 pour cent de notre empreinte de GES, dont plus de 50 pour cent sont attribués aux émissions provenant de la consommation d’énergie des locataires.
Nous savons que nous ne pouvons atteindre le net zéro isolément. Nous avons besoin de collaboration et de partenariat non seulement avec nos locataires, mais aussi avec nos pairs de l’industrie pour atteindre notre objectif commun du net zéro. À cette fin, en novembre 2022, nous avons organisé une première édition du forum Collaboration pour l’action climatique, en partenariat avec Choice Properties REIT. Ce forum a réuni les principaux locataires nationaux du commerce de détail et d’importants propriétaires d’immeubles du commerce de détail pour discuter de solutions et de la planification de la décarbonation de ces immeubles au Canada.
Ce forum nous a tous enthousiasmés et stimulés. Nous avons convenu qu’il fallait en faire le point de départ pour un engagement et une collaboration continus. C’est pourquoi nous créons des groupes de travail de cette Collaboration pour l’action climatique. Ils seront formés de représentants de propriétaires et de locataires de commerces de détail et orienteront leur action sur la promotion des occasions importantes à saisir et la mise en œuvre d’initiatives particulières identifiées tout au long du forum.
La conférence nationale du CBDCA est dans quelques semaines à peine et nous sommes heureux de vous compter de nouveau parmi les panélistes invités. Pouvez-vous nous parler un peu de la séance à laquelle vous participerez?
Je suis très heureuse d’être de retour comme panéliste! Cette année, je partagerai la scène avec des panélistes formidables de KingSett Capital, Cadillac Fairview, Minto et WSP. La séance s’intitule « Securing Stakeholder Buy-in for a Low-Carbon Transition » (S’assurer de l’adhésion des parties prenantes pour une transition vers la sobriété en carbone). Nous savons que la planification de cette transition est déterminante pour l’atteinte de la carboneutralité des portefeuilles immobiliers et il sera essentiel d’engager une diversité de parties prenantes pour aller de l’avant et mettre le plan en œuvre. Nous partagerons nos expériences, nos stratégies et notre quête d’amélioration continue pour assurer l’adhésion et l’engagement des conseils d’administration de nos locataires.
Croyez-vous que le partage des coûts et des avantages liés à la réduction des émissions de carbone entre les propriétaires et les locataires sera une mesure efficace pour promouvoir les projets de rénovation?
Je pense que ce sera un élément déterminant pour promouvoir les projets de réduction des émissions de carbone. Actuellement, il y a une zone grise lorsqu’il est question des responsabilités et des avantages de la mise en œuvre de mesures de réduction des émissions, de sorte que les deux parties hésitent à investir dans l’option la plus efficace. Par exemple, si le propriétaire possède l’équipement, on peut penser qu’il lui revient de payer les frais de remplacement, mais si le locataire paie les factures d’énergie, c’est lui qui réalisera les économies découlant de la rénovation. Cet obstacle à la modernisation des bâtiments est souvent appelé « problème de la motivation partagée » et il est souvent intégré dans les baux existants.
Un bail écologique qui prévoit le partage équitable des coûts est un mécanisme efficace pour résoudre cette question, mais pensez à tous les baux actuels qui ont encore 5, 10 ou 15 ans à courir! On peut espérer qu’en tant qu’industrie, nous pourrons démontrer qu’une approche de partage des coûts pour ces projets qui soit équitable pour le locataire et le propriétaire permettrait de surmonter cet obstacle plus rapidement et plus efficacement que la renégociation de certaines clauses spécifiques des baux.
Un des groupes de travail du forum Collaboration pour l’action climatique sera chargé de conceptualiser et d’élaborer des outils novateurs qui seront testés dans des processus et des transactions clés. La création de tels outils vise à trouver de nouvelles façons de diviser les coûts en se basant sur les économies réalisées sur les coûts opérationnels et de réduire les émissions nettes des propriétaires et des locataires. Nous sommes tous à la recherche de nouveaux modèles et de conseils sur la façon d’intégrer les considérations climatiques dans nos principaux processus d’affaires et dans nos outils et documents d’appui et nous espérons que le travail en collaboration accélérera les progrès.
Quel aspect de Bâtir un changement durable attendez-vous avec le plus d’impatience?
J’ai bien hâte de retrouver mes pairs, collègues et amis du domaine et d’établir de nouvelles relations. On ne sait jamais quelles possibilités de collaboration peuvent se présenter! J’attends aussi avec impatience les séances de formation continue et les visites guidées. J’espère repartir avec certaines idées nouvelles pour faire avancer la décarbonation du portefeuille de FCR.